Libération, Éric Loret, 25 juillet 2008
C’est comme un cahier d’enfance, à petits carreaux, ou à comptabilité, un truc qui [+]
C’est comme un cahier d’enfance, à petits carreaux, ou à comptabilité, un truc qui ne rigole pas avec les cadres et la règle à mesurer. Laurent Cilluffo, lui, s’en moque, des lignes droites, et ce dessinateur au style logotypique (World Trade Angels, en 2006) livre ici une course mystérieuse qui ne vaut que pour elle-même, celle d’un homme-sandwich portant le mot « New » sur sa pancarte, puis l’image de sa tête. Forcément, sa tête soubassée du mot « wanted » ferait plus de sens et c’est d’ailleurs ce qui arrive : il sera pris en chasse par la police sans qu’on sache très bien pourquoi.
Plus que du bonhomme, New WANTED est surtout l’aventure de la ville en tant que personnage. C’est un sujet obsessionnel chez Cilluffo. Le film, pardon, livre, commence à huit heures cinq du mat’ dans une cité moderne. On sent déjà l’épuisement pérecquien poindre. Sur une même double page, Cilluffo figure des non‑événements de façon simultanée (des dactylos qui dactylotent, des bus qui se ratent, des rangs d’oignons en toutes occasions de la vie) et parfois dans un même lieu : on voit ainsi la vie dans les magasins et, en dessous, celle du métro.
Mais souvent aussi, bien malin qui dira comment s’articulent entre eux les dessins. C’est à ce moment-là qu’il faut rire : Cilluffo rabat l’axe du temps sur celui de l’espace et tire de cette étude des micromouvements de la vie (car les sourcils bougent, il faut bien observer) un plaisir digne de Playtime ou de Norman McLaren. [-]