Chonic'art (n° 32), N. B., 1 janvier 2007
Ceux qui n’ont pas la chance de casser la croûte chez eux, en semaine à 14h00 [+]
Ceux qui n’ont pas la chance de casser la croûte chez eux, en semaine à 14h00 n’ont fait qu’entr’apercevoir – dans des zappings et autres moqueries télévisuelles –le mythique soap opéra Les Feux de l’amour, pilier de TF1 depuis plus de quinze ans, qui sévit aux Etats-Unis depuis trois décennies. Le principe du soap c’est, rappelons-le : sentiments passionnels et intrigues à foison, le tout découpé en champs/contrechamps sous forme de gros plans. Danny Steve — un pseudo qui ne déparerait pas au générique des Feux — tente d’en extraire la substantifique moelle en décalquant deux scènes (et une amorce de troisième) extraites du feuilleton, soit dix minutes. L’entreprise laisse cependant sur sa faim : il y avait pourtant matière à servir l’ambitieux propos de l’auteur — voir son « Épilogue savant » —, soit « approcher le secret de l’existence ». Néanmoins, elle s’arrête en chemin, ne consacrant que 60 pages à la démonstration. En revanche, le format de l’oeuvre tirant vers le flip-book apparaît comme un concept intéressant, en contrepoids de la narration hyper dilatée de la série, renforçant l’impression de déjà-vu qu’offre la lecture de la seconde scène après (fatalement) la première. Bref, Danny Steve se serait-elle dégonflée face à l’ampleur du sujet à traiter ? Ou a-t-elle eu honte de son objet d’étude ?
Pour frustrantes qu’elles soient, ces néanmoins intenses Dix minutes amènent le spectateur averti à s’interroger sur le sérieux de l’oeuvre : alors que Steve « garantit l’authenticité de cet extrait des Feux de l’amour, feuilleton diffusé en 1997 (…) reconstitué plan par plan », pas de Lucidia dans les vrais Feux, mais une horripilante Drucilla, et l’Eve au coeur de la deuxième séquence de la BD a les traits de la redoutable Jill Abott… Maladresse de l’auteur ? Ou manque de considération pour l’oeuvre originale ? Davantage de sérieux aurait été apprécié, tout de même. [-]