BoDoï, Benjamin Roure, 4 février 2010
Voici un ouvrage étrange [+]
Voici un ouvrage étrange, ni vraiment bande dessinée, ni livre illustré. Cocaïne et chaussons blancs est un objet singulier tournant autour d’une icône de la pop moderne : Amy Winehouse. Icône, le mot est juste car l’auteure de ce livre ‑ publié par les audacieuses Éditions Matière ‑ se concentre sur des images de la star telle qu’elle apparaît dans les magazines. Ainsi, c’est un portrait par page que propose Eugénie Lavenant, des dessins en noir et blanc de la chanteuse dans son quotidien, dans la rue, à l’épicerie, au bord d’une piscine. Photos posées ou volées faisant la une de la presse tabloïd, détournées ici par un trait intemporel, qui propulse ces images de basse extraction au rang d’œuvres d’art contemporain.
Peu de textes, juste quelques phrases descriptives et froides, tantôt amusées, tantôt écœurées. Comme pour réduire encore plus Amy Winehouse à l’archétype qu’elle s’est créé. « Elle est comme une pute de Brixton qui sort les poubelles », peut-on lire au détour d’une page. Jamais elle ne sera nommée, ce qui désincarne encore plus le personnage pour le cantonner au rang des icônes inaccessibles ‑ et peut-être irréelles.
Tout au long de ce volume (72 pages), on mate ainsi une star à la dérive, qui visiblement fascine, attendrit et énerve Eugénie Lavenant. En alignant des portraits peu flatteurs d’Amy Winehouse, elle la présente comme une petite fille capricieuse qu’on aurait poussé trop vite et toute seule sous les projecteurs. Et ce n’est peut-être pas si loin de la réalité. [-]