RééducationJuan Pérez Agirregoikoa
En 1976 paraît L’Ange aux Éditions du Seuil. Par ce petit livre très dense, Guy Lardreau et Christian Jambet tentent d’offrir, immédiatement à la suite de l’autodissolution de la Gauche prolétarienne, ce qu’ils appelle un « vadémécum pour tous, un guide des égarés », partant du constat qu’« il n’y a plus de Rebelle qui tienne et que l’époque loue sous le nom du Rebelle l’ombre du Maître. »
En 2012 paraît Rééducation de l’artiste basque espagnol Juan Pérez Agirregoikoa. Où le mot « rééducation » est devenu un ornement pour les chiens, la rutilante marque du maître. Où ferveur partisane sportive et ferveur politique se confondent en une réciproque gesticulation. Où il y a un ennemi. Où « esprit » est le nom de l’ennemi. Où on attrape Hanna Arendt à l’entrée du stade et on la lui fait à l’envers : « Ceux qui n’oublient pas le passé se condamnent à faire de l’idéologie », hop là ! Où on découvre le vrai visage des hooligans sans même ôter leur cagoule. Où on ne sait plus que penser, sinon appeler l’imbécilité de ses voeux — ce qui sent fort la conjuration. Où on réclame du lait et des biscuits. Où on est supersensible mais on se soigne à l’adoucissant. Où la Décision concernant la Grande Révolution culturelle prolétarienne rédigée par le président Mao en 1966 n’est plus qu’un papier de rebut, une chute d’imprimeur, la doublure du rideau de scène. Où tout finit sur un ciel bleu, un ciel d’une grande clarté tragiquement suturé et que déchire encore un avion traînant sa banderole : « Lacan I love U. Will U marry me? ».
Toute une rééducation à refaire, en somme.
En équilibre bancal entre le spectacle modeste, le plaisir enfantin du pop-up et les jeux grotesques, les mascarades régressives des adultes, entre joli produit de l’industrie des loisirs et outil critique, Juan Pérez Agirregoikoa tient Rééducation sur une ligne farouchement rétive à toute interprétation immédiate, positive et recyclable.
À part ça, rien de grave : Juan Pérez Agirregoikoa est un artiste après tout.
Ingénierie papier effectuée par Philippe UG.
Ouvrage réalisé avec le soutien du gouvernement basque.
REVUE DE PRESSE
En jeu (Ufolep), Philippe Brenot, 15 juin 2012mitamax + pliages manuels, 23 x 30 cm
tirage limité : 300 ex. ouvrage quadrilingue : français, basque, anglais, espagnol
hors diffusion : vente directe éditeur
EAN 9782916383323, 90 €
Fin mai 2011, invité à participer à la 4e Biennale d’art contemporain d’Anglet, Juan Pérez Agirregoikoa propose une intervention intitulée Lalangue lavion. Se basant sur l’observation des pratiques publicitaires estivales (ces avions qui traînent au-dessus des plages leur calicot à messages tantôt commerciaux tantôt amoureux), entreprend de déployer ses habituelles bannières et slogans dans le ciel.
À un avion partant de Bilbao, il accroche la banderole « Marx I love you, will you marry me? », et la fait voler le long de la côte basque jusqu’à Anglet, puis retour, franchissant par deux fois la frontière. Pendant ce temps, l’aérodrome arbore diverses déclarations lacaniennes accrochées comme autant de revendications.
La dernière page de Rééducation évoque cette exposition-à-même-le-ciel. Déployant un morceau d’azur, elle porte cette fois la bannière « Lacan I love you, will you marry me? ».
En décembre 2012 dans l’atelier de Juan Pérez Agirregoikoa, Philippe UG, Laura Denizot et Émilie Lay entreprennent l’assemblage des pièces qui constitueront les pop-up de Rééducation.
librairie du Palais de Tokyo,
Paris
jeudi 20 septembre 2012
de 19 à 21 heures
Lancement de l’ouvrage Rééducation, de Juan Pérez Agirregoikoa en sa présence et celle de Philippe UG, ingénieur papier.
Rééducation est un livre en pop-up à tirage limité. Des posters numérotés (1 à 50) et signés, produits à partir des planches d’impression du livre sont également en vente à cette occasion.